Coup d’État au Burkina Faso : Retour à l’ordre kaki | Gabonreview.com

[ad_1]

 

Accueillis par des salves d’applaudissements, les événements en cours à Ouagadougou sont perçus comme un pied de nez à la France, une initiative émancipatrice. Triste constat…

En démocratie, l’armée ne peut se muer en acteur politique. Censée assurer la protection du territoire et la défense de la souveraineté nationale, elle doit être soumise au pouvoir politique civil. © D.R.

 

De 1952 à aujourd’hui, l’Afrique a enregistré 155 coups d’Etat. Ont-ils contribué à faire avancer le continent ? Ont-ils favorisé une amélioration de la gouvernance ? Ont-ils permis de garantir le mieux-être pour les populations ? Objectivement, nul ne saurait le prétendre. Bien au contraire. Pourtant, à quelques exceptions près, la plupart des putschs sont accueillis par des salves d’applaudissements. Systématiquement, certains y voient un pied de nez à la France et à sa politique africaine. D’autres saluent des initiatives émancipatrices. Il s’en trouve aussi pour épiloguer sur le passé colonial de certaines puissances ou la dignité de l’homme africain. Entre raccourcis intellectuels et sentences à l’emporte-pièce, toute la vulgate d’inspiration panafricaniste est reprise. Entre émotion et agitation, toute la rhétorique pseudo-révolutionnaire est remise au goût du jour.

Piètres gestionnaires, peu respectueux des droits humains

On peut comprendre le ras-le-bol des populations. On peut expliquer le désamour vis-à-vis de la France. On peut justifier le rejet d’une certaine pratique politique. Mais, l’intrusion de l’armée dans le champ politique demeure un frein à l’enracinement de la bonne gouvernance et de la démocratie. Très souvent, les auteurs de coups d’Etat se révèlent piètres gestionnaires et peu respectueux des droits humains. On l’a vu en Guinée : non content d’avoir folklorisé l’État, Moussa Dadis Camara ordonna le massacre du 28 septembre 2009. On l’a vu en Sierra Leone où Valentine Strasser confia la sécurité nationale aux milices privées, mercenaires internationaux et autres supplétifs d’armées étrangères. On l’a aussi vu au Tchad, Hissène Habré ayant fini par être jugé puis, reconnu coupable de crimes contre l’humanité, viols, exécutions sommaires, esclavage et enlèvements.

Malgré ces précédents, d’aucuns se réjouissent des événements en cours à Ouagadougou. A les entendre, Roch Marc Christian Kaboré était dépassé par les événements, incapable de concevoir une stratégie de lutte contre le djihadisme. En leur entendement, l’ancien président burkinabé n’aurait jamais dû cautionner les sanctions infligées à la junte malienne par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao). En le faisant, il se serait mué en supplétif de la France voire en adversaire de l’émancipation du Mali. D’où l’urgence de le chasser du pouvoir. Peut-on entendre cette argumentation ? Peu importe. En démocratie, l’armée ne peut se muer en acteur politique. Censée assurer la protection du territoire et la défense de la souveraineté nationale, elle doit être soumise au pouvoir politique civil. Or, en 2015 comme en 2020, Roch Marc Christian Kaboré fut élu, se payant le luxe de passer dès le premier tour. C’est dire s’il jouit d’une réelle légitimité démocratique.

Entorse aux fondamentaux de la bonne gouvernance

L’armée peut-elle remettre en cause une légitimité acquise au terme d’élections libres et crédibles ? Volens nolens, les coups d’Etat attestent toujours de la fragilité des processus de démocratisation. Ils témoignent de la faible imprégnation de la société aux principes démocratiques. Si l’armée veut être au service de la démocratie, elle doit respecter les choix librement exprimés par le peuple. En aucun cas, elle ne peut les remettre en cause ou prétendre représenter l’intérêt général. Elle ne peut non plus sortir de son rôle, au risque de se rendre coupable d’une violation de la Constitution. Pour une émancipation des peuples, il faut promouvoir la bonne gouvernance. Or, la bonne gouvernance passe par la conjugaison de quatre éléments : Etat de droit, transparence, ouverture et redevabilité. Cela suppose un respect scrupuleux de la Constitution et des rôles reconnues à chacune des institutions, civiles ou militaires.

L’inefficacité de la lutte anti-djihadiste peut-elle justifier une entorse à ces fondamentaux ? On le voit au Mali : il ne suffit pas de remplacer un pouvoir civil par une junte pour bouter les terroristes hors de son territoire. Comme on le relève au Mozambique, la présence de l’entreprise russe Wagner ne garantit pas une victoire rapide et écrasante, la lutte anti-terroriste n’ayant rien d’une guerre conventionnelle. Or, la sécurité était l’un des thèmes majeurs de la campagne présidentielle de 2020.  Contrairement à Zéphirin Diabré, Roch Marc Christian Kaboré s’était alors prononcé pour une option strictement militaire. Sur ce point, l’armée et lui sont sur la même ligne. De ce point de vue, on peine à saisir le sens du putsch en cours. Sauf si les militaires s’estiment en capacité de traquer les djihadistes, au lieu de se contenter de réagir. Sauf aussi s’ils ne veulent plus avoir à recours aux Volontaires pour la défense de la patrie (VDP). Pour l’heure, une réalité s’impose : l’Afrique a amorcé un retour à l’ordre kaki. Triste constat…



[ad_2]

Source link

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Défilement vers le haut