Coup d’État au Burkina Faso : Messages inquiétants | Gabonreview.com

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L’arrivée au pouvoir de Paul-Henri Damiba solde l’héritage de l’insurrection de novembre 2014, passant par pertes et profits les sacrifices de tout un peuple. 

En choisissant de suspendre la Constitution, de dissoudre les institutions et de placer les armes au-dessus du bulletin de vote, Paul-Henri Damiba et ses acolytes ont envoyé une série de messages inquiétants. © D.R.

 

De toute évidence, l’Afrique de l’ouest revient à l’ordre kaki. Après le Mali et la Guinée, le Burkina Faso est le théâtre d’un coup d’Etat. Le 24 janvier courant, une lettre de démission, signée de Roch Marc Christian Kaboré, a été rendue publique. Quelques minutes plus tôt, des militaires avaient annoncé avoir pris le pouvoir. Affirmant être regroupés au sein du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), ils ont édicté des mesures radicales : fermeture des frontières terrestres et aériennes, dissolution des institutions et, suspension de la Constitution. Depuis lors, c’est la bouteille à l’encre, personne n’étant en mesure ni de dire où se trouve l’ancien président de la République ni de cerner les réelles intentions des putschistes.

Ni quête d’émancipation ni réalisation d’un dessein collectif

En Guinée, Mamadi Doumbouya avait justifié son coup de force par «le dysfonctionnement des institutions républicaines (…) l’irrespect des principes démocratiques (…), la gabegie financière, la pauvreté et la corruption.» Au Mali, Assimi Goïta avait décrit son putsch comme la réponse à «une situation de crise socio-politique et sécuritaire.» A quelque chose près, Paul-Henri Damiba a repris cet argumentaire. Pointant l’inefficacité de la stratégie de lutte contre le djihadisme, il a dit vouloir «permettre à (son) pays de se remettre sur le bon chemin (…) afin de lutter pour son intégrité territoriale, son redressement et sa souveraineté.» Mais, son discours ne trompe guère. Ses agissements non plus. N’en déplaise aux gogos de tout poil, tout ceci ne participe ni d’une quête d’émancipation ni de la réalisation d’un dessein collectif. Bien au contraire. En suspendant la Constitution, le MPSR a soldé l’héritage de l’insurrection de novembre 2014, passant par pertes et profits les sacrifices de tout un peuple. En dissolvant les institutions, il a remis en cause les choix exprimés lors des élections de 2015 et 2020.

Certes, l’armée peut toujours revendiquer sinon un rôle déterminant, du moins une bienveillante neutralité dans la réussite de la Deuxième révolution burkinabé. Certes, la légitimité démocratique n’est pas un chèque en blanc. Mais, la lutte pour la souveraineté nationale suppose un respect scrupuleux de la Constitution. Elle suppose aussi de la considération pour les représentants librement choisis par le peuple. Faute de le comprendre, on ouvre la voie à la confrontation et à la guerre. Faute de l’appliquer, on fait le lit au surplace voire à la déliquescence de l’Etat. Loin de se réduire à une incantation, la souveraineté nationale est attachée au peuple. Fondée sur un régime représentatif, elle ne se limite pas aux seuls citoyens vivants. Elle concerne aussi les citoyens passés ou futurs. Or, à travers leurs premières mesures, les militaires burkinabé ont banalisé l’un des événements les plus marquants de leur histoire : le départ de Blaise Compaoré à la suite d’un soulèvement populaire.

Le curseur au 15 octobre 1987

En choisissant de suspendre la Constitution et de dissoudre les institutions, Paul-Henri Damiba et ses acolytes ont envoyé une série de messages inquiétants. En plaçant les armes au-dessus du bulletin de vote, ils ont ramené le curseur au 15 octobre 1987. Ce faisant, ils ont craché sur la mémoire des victimes des luttes pour l’alternance. De même, ils ont nié la pertinence du combat contre la non-limitation du nombre de mandats présidentiels, balayant d’un revers de main le travail des forces sociales acquises à la démocratie et à l’Etat de droit. Comme si l’Union pour le progrès et le changement, le Mouvement sankariste, le Mouvement du peuple pour le progrès, et le Balai citoyen avaient eu tort de se soulever contre les pouvoirs à vie. Comme si ces entités n’avaient jamais œuvré pour mettre le Burkina Faso «sur le bon chemin

S’ils avaient agi après avoir réfléchi à la construction d’une communauté de destin, les militaires burkinabé auraient cherché à capitaliser les acquis des événements de 2014. Pour ce faire, ils se seraient appuyés sur quatre piliers : la Constitution, le Conseil constitutionnel, l’Assemblée nationale et les forces sociales. Ayant obtenu la démission de Roch Marc Christian Kaboré, ils n’auraient eu aucun mal à faire constater la vacance du pouvoir. Auraient-ils pu plaider pour un intérim constitutionnel ? On peut le croire. Au besoin, ils auraient organisé une concertation pour en déterminer la durée, quitte à demander des amendements. Après tout, l’article 43 de la Constitution et certaines dispositions finales ou transitoires auraient très bien pu être retouchées par voie parlementaire. Ainsi se seraient-ils offert la possibilité d’amener l’ensemble des acteurs à réaffirmer leur attachement à un projet et une vision commune.  S’il veut marquer l’histoire de son pays, Paul-Henri Damiba peut encore changer de braquet.



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